Je pense que je ne veux pas—ne pas—avoir de regrets quand je vais mourir.
Depuis que je suis petit j’entends ça ici pis là des fois, d’essayer de vivre pour pas avoir de regrets.
Déjà je pense pas que ce soit possible, mais plus encore, je pense que c’est beau, quelque part de fondamental, les regrets, que c’est pas quelque chose que je dois à tout prix essayer d’éviter, comme une antilope le ferait avec un lion en pleine chasse derrière elle. Je pense que j’ai envie de les accueillir pis de les chérir comme le fait un enfant qui attrape un flocon—une preuve que ma courte existence porte quelque chose de fragile et précieux en elle.
Quand je m’amuse à penser à ma fin, au temps qui passe, à la perte, à fondre lentement comme un flocon, à ma mort—quand je m’imagine repenser à toute ma vie, un peu comme je le fais des fois en ce moment déjà en repensant à mon enfance, à ce que je n’ai plus, aux moments déjà perdus dans le temps, je me sens me remplir doucement d’une sorte de petite tristesse précieuse. Je pense que si je n’avais pas cette petite tristesse, quelque part, je ne porterais pas la même importance à ma vie en tant que vie. Que c’est cette petite tristesse précieuse qui me lie au désir de vivre et à l’importance éphémère de mon passage ici.
Non. Définitivement. Je ne veux pas—ne pas—avoir de regrets quand je vais mourir.
Je veux avoir des regrets, sentir vraiment la fragilité et la petitesse de ma vie dans l’infini du cosmos géant.
Toucher le précieux de ce que je suis.
Sentir l’importance de moi.
Et probablement verser quelques larmes
de peine
et
de joie.